Reconnaître une maladie professionnelle : droits et indemnisation des agents

Comment obtenir l'imputabilité d'une maladie professionnelle dans la fonction publique ?

L’article L.822-20 du Code de la fonction publique prévoit qu'"est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau".

Cet article mentionne également que "Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions."

Enfin, cet article prévoit que "Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat."

Le régime de prise en charge dépendra donc de la nature même de la pathologie.

L'imputabilité en cas d’absence de réunions des conditions prévues par les tableaux ou en cas de maladie non prévues par les tableaux

Si l’une des conditions prévues par le tableau est manquante, l’agent titulaire de la fonction publique peut néanmoins obtenir la reconnaissance de l’imputabilité de sa pathologie s’il démontre l’existence d’un lien direct et certain entre ses conditions de travail et la survenance de sa maladie.

Par ailleurs, si la pathologie n’est pas prévue par les tableaux, aussi communément appelée Maladie hors-tableaux, l’agent peut faire reconnaître son imputabilité au service en démontrant la réunion de deux conditions :

  • L’existence d’un lien direct et essentiel entre les conditions de travail et la survenance de la pathologie.
  • La pathologie est susceptible d’entraîner un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) supérieur ou égal à 25% à la date de la première constatation médicale.

Le régime juridique applicable selon la date de première constatation médicale de la pathologie

Le régime de prise en charge varie selon la fonction publique concernée et la date de survenance de la maladie :

Les conditions pour la reconnaissance de l’imputabilité de la maladie au service

Comme précédemment indiqué, trois régimes de prise en charge coexistent :

  1. Présomption d'imputabilité pour les maladies désignées par les tableaux, sous réserve de conditions liées au délai, à la durée d’exposition et à la nature des travaux effectués.
  2. Démonstration d'un lien direct et certain entre la survenance de la pathologie et les conditions de travail pour les maladies professionnelles prévues par les tableaux mais dont une des conditions prévues est manquante (délai de prise en charge, délai d'exposition ou liste limitative des travaux).
  3. Démonstration d'un lien direct et essentielle entre la survenance de la pathologie et les conditions de travail ainsi que la démonstration du fait que la pathologie est susceptible d'entrainer un taux d'IPP prévisible supérieur à 25% pour les maladies professionnelles hors-tableaux.

Cependant, le bénéfice de ces dispositions étant encore récent, certaines Administrations continue encore à tort de demander aux agents de prouver l’imputabilité sans appliquer pleinement ces textes.

La procédure administrative de déclaration d'une maladie professionnelle à suivre

En droit de la fonction publique, c'est à l'agent de réaliser une déclaration de maladie professionnelle.

L'agent dispose d'un délai de 2 ans suivant la première constatation médicale de la pathologie pour réaliser les démarches.

Ce délai est impératif. A défaut, l'Administration est fondé à rejeter la demande.

L'agent doit transmettre:

La déclaration doit être envoyée à l’administration dans les 2 ans suivant la première constatation médicale, idéalement par courrier recommandé avec accusé de réception.

L'Administration dispose d'un délai de 2 mois pour instruire votre demande.

Ce délai peut être prorogé de 3 mois supplémentaire en cas de recours à une enquête administrative ou à une expertise médicale.

En cas de non respect de ce délai, l'Administration doit placer l'agent en congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS), à titre provisoire, dans l'attente de l'issue de l'instruction.

La déclaration de maladie professionnelle être transmise par courrier recommandé avec accusé de réception afin de pouvoir démontrer la date à laquelle le délai d'instruction a commencé à courir.

Il est fondamental pour l'agent de démontrer au sein de sa déclaration de maladie professionnelle que les conditions permettant de bénéficier de la présomption d'imputabilité sont bien réunies.

La procédure d'instruction de la déclaration de maladie professionnelle sera différente selon si-celle rentre dans les tableaux ou non.

Votre Administration sollicite tout d'abord l'avis du médecin de prévention si votre maladie rentre dans les tableaux.

Si celui-ci constate que l'ensemble des conditions visées par les tableaux sont réunies, votre Administration pourra rendre une décision.

En revanche, si celui-ci constate que l'ensemble des conditions visées par les tableaux ne sont pas réunies, le Conseil Médical devra être saisi afin de rendre un avis sur l'existence d'un lien direct et certain.

Le Conseil Médical désigne alors un médecin agrée qui sera chargé de vous examiner et de rendre un rapport d'expertise concluant ou non à l'existence d'un lien direct et certain.

Son rapport est transmis au Conseil Médical qui rendra un avis consultatif.

Votre Administration n'est pas liée par l'avis du Conseil Médical.

Une décision est ensuite prise par votre Administration.

En revanche, si votre déclaration concerne une maladie professionnelle hors-tableau, votre Administration est dans l'obligation de saisir le Conseil Médical.

Le Conseil Médical désigne alors un médecin agrée qui sera chargé de vous examiner et de rendre un rapport d'expertise concluant ou non à l'existence d'un lien direct et essentiel et si la pathologie est susceptible d'entrainer un taux d'IPP prévisible supérieur à 25%.

Son rapport est transmis au Conseil Médical qui rendra un avis consultatif.

Votre Administration n'est pas liée par l'avis du Conseil Médical.

Une décision est ensuite prise par votre Administration.

La procédure applicable en cas de refus de prise en charge de votre maladie professionnelle

L'Administration finira nécessairement par vous notifier une décision.

Si celle-ci venait à être défavorable, vous avez la possibilité de contester celle-ci.

Vous pouvez soit exercer un recours gracieux ou un recours hiérachique soit directement saisir le Tribunal Administratif d'un recours pour excès de pouvoir devant le Tribunal Administratif.

En cas de recours gracieux ou hiérarchique, l'Administration dispose d'un délai de 2 mois pour vous faire réponse.

Passé ce délai, une décision implicite de rejet est réputée avoir été rendue du fait du silence gardé par l'Administration.

Vous diposez alors d'un nouveau délai de 2 mois pour réaliser un recours pour excès de pouvoir devant le Tribunal Administratif compétent.

Le recours, contentieux ou non contentieux, peut reposer sur deux catégories d'illéaglitées :

  • Les illégalités interne: erreur de droit (non-application de la présomption d’imputabilité), erreur d'appréciation, etc....
  • Les illégalités externes: incompétence e l'auteur de l'acte, défaut de motivation, irrégularité procédurale (avis du Conseil Médical non conforme).

L'étendue des pouvoirs du juge n'est pas la même en fonction de la nature de l'illégalité entrainant l'annulation de la décision de refus de prise en charge de l'accident de service.

En effet, le juge du recours pour excès de pouvoir est le juge de l'annulation.

Son office principale est l'annulation de l'acte attaqué.

Cependant, le juge peut également l'Administration de réaliser une action donnée.

En cas d'annulation pour illégalité externe, le juge ne peut qu'enjoindre à l'Administration de réexaminer la situation de l'agent.

En cas d'annulation pour illégalité interne, le juge peut enjoindre à l'Administration de prononcer l'imputabilité de l'accident de service.

Aussi, dans ce type de procédure, il est préférable d'obtenir une annulation sur la base d'une illégalité interne afin de s'assurer de la reconnaissance de l'imputabilité de l'accident au service.

Maître RENOULT se charge de la rédaction de l'intégralité des actes de procédure afin de vous permettre de faire valoir vos droits.

Les effets du congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS)

Le CITIS vous permet de conserver l’intégralité de votre traitement jusqu’à la reprise ou la mise à la retraite.

L’article L.822-22 du Code général de la fonction publique le prévoit spécifiquement :

« Le fonctionnaire bénéficiaire d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. »

Le CITIS couvre également:

  • Les frais médicaux, prothèses, transport, examens et consultations.

L’article L.822-24 du Code général de la fonction publique le prévoit spécifiquement :

« Le fonctionnaire qui bénéficie d'une reconnaissance d'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie a droit au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par sa maladie ou son accident. »

  • Les droits à avancement et à retraite sont maintenus.

L’article L.822-23 du Code général de la fonction publique le prévoit spécifiquement :

« La durée du congé pour invalidité temporaire imputable au service est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé. »

La fin du CITIS et la consolidation de l'état de santé de l'agent

Une fois l'imputabilité de la maladie au service reconnue, vous serez régulièrement convoqué auprés d'un médecin agrée désigné par votre Administration afin de contrôler l'évolution de votre état de santé.

A l'issue de cet examen, soit le médecin agrée estime que votre état de santé est toujours évolutif et prolonge votre CITIS, soit celui-ci estime que votre état de santé est consolidé.

La date de consolidation correspond à la date à laquelle la pathologie est stabilisée et que votre état de santé n'est plus susceptible d'amélioration.

Elle peut conduire à :

  • Une guérison complète.
  • Une consolidation avec séquelles indemnisables (taux d’IPP).

Le médecin agrée fixe alors la date de consolidation de vos séquelles, se prononce sur l'existence de séquelles définitives et évalue leur ampleur au travers la fixation d'un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) évalué sur la base du barèmes des pensions civiles et militaires.

Le médecin agrée doit également se prononcer sur votre aptitude à reprendre vos fonctions.

Schématiquement, plusieurs dégré d'aptitude ou d'inaptitude peuvent être rendu:

  • Aptitude aux fonctions (donc reprise de poste).
  • Inaptitude aux fonctions mais pas à toutes fonctions dans la focntion publique (donc reclassement).
  • Inaptitude aux fonctions et à toutes fonctions dans la fonction publique (donc mise en retraite pour invalidité) .

Il est important de préciser que le CITIS ne prend pas fin systématiquement à la date de consolidation de l'état de santé de l'agent.

En effet, l'agent est maintenu en CITIS jusqu'au rétablissement de son aptitude à ses fonctions ou jusqu'à l'effectivité du reclassement en cas d'inaptitude à ses fonctions mais pas à toutes fonctions ou jusqu'à sa radiation des cadres pour mise en retraite pour invalidité en cas d'inaptitude totale et définitive à toutes fonctions.

La réparation forfaitaire des conséquences de la maladie professionnelle: l'Allocation temporaire d'invalidité (ATI) et la rente viagère d’invalidité (RVI)

En cas de séquelles définitives nécessitant l'octroi d'un taux d'IPP, vous pouvez bénéficier :

Le montant de ces prestations dépend directement du taux d’incapacité permanente (et du traitement indiciaire brut pour la RVI).

Le montant de l'ATI est égal à 1 230,70 € multiplié par votre taux d'invalidité.

Elle est exonérée de l'impôt sur le revenu.

Le montant de la rente viagère d'invalidité est égal au dernier traitement indiciaire brut utilisé pour le calcul de votre pension multiplié par votre taux d’invalidité.

Le bénéfice de l'ATI est donc moins intéressant que celui de la RVI.

La réparation complémentaires des conséquences de la maladie professionnelle: l'action indemnitaire

En cas de reconnaissance de l’imputabilité d’un accident ou d’une maladie professionnelle au service, l’agent titulaire peut obtenir une indemnisation complémentaire, en plus de l’ATI ou de la RVI. Plus de détails sur la réparation des préjudices dans la fonction publique.

Ce principe a été consacré par l’arrêt Moya Caville (CE, Assemblée, 04 juillet 2003, n°211106), puis confirmé par le Conseil d’État (20 février 2019, n°408653).

Exemples de préjudices indemnisables : frais de santé, déficit fonctionnel, préjudice esthétique, recours à tierce personne, adaptation du domicile ou du véhicule… .

Actualité: La confirmation du droit à indemnisation complémentaire du fonctionnaire

Vous pouvez consulter notre page spécifique à cette procédure indemnitaire afin d'en savoir plus.

Avocat expert en accident de service et maladie professionnelle

Maître Baptiste Renoult vous accompagne à chaque étape : recours contre un refus d’imputabilité, procédure devant le Conseil Médical, expertise judiciaire, indemnisation de vos préjudices (moral, économique, professionnel). Le cabinet est basé à Rouen, avec possibilité d’intervention nationale à distance.

Site officiel : www.renoult-avocat.fr – Téléphone : 02 35 98 71 02 – Mail : baptiste.renoult@renoult-avocat.fr

Adresse : 31 rue des Arsins, 76000 ROUEN

Foire aux questions (FAQ) sur l'imputabilité des maladies professionnelles dans la fonction publique

Qu’est-ce que l’imputabilité d’une maladie professionnelle au service ?

L’imputabilité au service signifie que la maladie professionnelle dont souffre l’agent public est directement causée par l’exercice de ses fonctions. Elle permet l’ouverture de droits spécifiques comme le CITIS, l’indemnisation des frais médicaux et, le cas échéant, l’obtention d’une rente ou d’une indemnisation complémentaire.

Comment prouver le lien entre la maladie et les fonctions exercées ?

En l’absence de présomption automatique, l’agent doit démontrer un lien direct et certain (ou essentiel) entre ses conditions de travail et la pathologie. Ce lien est évalué par le Conseil Médical via une expertise médicale indépendante.

Quelles démarches effectuer pour faire reconnaître une maladie professionnelle dans la fonction publique ?

L’agent doit déclarer la maladie dans un délai de 2 ans à compter du premier constat médical. Il doit joindre un certificat médical initial et le formulaire officiel de déclaration. L’administration dispose ensuite de 2 à 5 mois pour statuer.

Qu’est-ce que le CITIS et quels sont ses avantages ?

Le CITIS (congé pour invalidité temporaire imputable au service) permet à l’agent de conserver l’intégralité de son traitement, le remboursement des frais médicaux, et le maintien des droits à retraite et avancement. Il prend fin à la reprise des fonctions ou à la mise en retraite.

Quels recours en cas de refus d’imputabilité par l’administration ?

L’agent peut déposer un recours gracieux, hiérarchique ou un recours contentieux devant le tribunal administratif. Un avocat spécialisé peut aider à identifier les erreurs de droit ou de procédure dans la décision de l’administration.

Puis-je obtenir une indemnisation complémentaire en plus du CITIS ?

Oui. En cas de reconnaissance d’imputabilité, vous pouvez obtenir une indemnisation complémentaire via une action indemnitaire fondée sur la responsabilité sans faute ou pour faute de l’administration. Cela permet de réparer intégralement vos préjudices.